Aude Cordonnier connait les rouages de la politique culturelle du département du Nord dont elle a été actrice grâce à son parcours. Débutant en tant que responsable de la médiation, elle devient directrice du musée de l’Hospice comtesse pendant onze ans puis directrice du Lieu d’Art et d’Action Contemporaine (LAAC) à Dunkerque. Avant tout, la politique culturelle départementale se joue sur les publics en insertion, en difficulté sociale, les collégiens et les personnes âgées. Ainsi, quelles sont les spécificités du département dans le cadre des politiques culturelles ?

Rôle du département du Nord dans la sauvegarde du patrimoine. 

Le département du Nord, joue un rôle majeur dans l’égalité et la mise en disposition des équipements culturels. En effet, la volonté des élus est de créer une égalité entre les territoires, notamment les plus fragiles qu’ils soient à la campagne comme en ville. Pourtant, la culture n’est pas une compétence obligatoire pour les départements, sauf pour les archives et l’accès aux livres (Bibliothèque, Médiathèque etc.). Toutefois, le département met en œuvre des projets permettant la prise en charge de musées dans l’optique de les conserver et de les valoriser.

Cette politique de prise en charge débute dans les années 1990 avec le musée Henri Matisse. Ouvert en 1982 et financé par la commune du Cateau-Cambrésis, le département devient gestionnaire et propriétaire du musée en 1992. En 1994, c’est le MusVerre de Sars-Poterie, qui avait comme projet initial la transmission du savoir-faire de la verrerie et l’exposition de verriers du monde entier, qui devient départemental. En 1997, c’est le musée de Cassel (musée de Flandre) qui passe sous la juridiction du département et ouvre officiellement en 2010, avec comme projet de lier la tradition artistique depuis le XVIe siècle à la création contemporaine. En 2000 vient le tour du musée archéologique de Bavay, suivi en 2009 par la prise en charge du site archéologique complet, rebâtissant ainsi le lieu en « Forum antique de Bavay ». La dernière action du département a lieu en 2017, avec l’abbaye de Vaucelles. Le département prend également en charge la gestion et l’administration de la maison natale de Charles de Gaulle (ouverte en 1983) qui reste néanmoins propriété de la fondation Charles de Gaulle depuis 1991.

Ces différents exemples démontrent le véritable développement des équipements culturels grâce au département dans le but de réduire les inégalités d’accès et de moyens.

La politique culturelle départementale

La gestion des musées départementaux présente plusieurs aspects.

Le premier est la mise en relation de ces musées entre eux. En effet, malgré leur éloignement géographique des centres urbains, le département a mis en place des moyens pour les relier. En effet, tout le monde ne peut pas se rendre dans ces lieux ruraux et la création des bus, mis en place par le département pour mieux desservir la zone, permet de combler ce manque qui permet de faciliter la médiation et la gestion des territoires, créant ainsi un maillage entre les équipements.

La présence d’écoles d’art dans le Nord de la France tout comme la richesse du domaine des arts visuels sont une opportunité à saisir. Par exemple, le musée Matisse a proposé aux écoles d’arts des Hauts de France de travailler sur la représentation de Matisse créant ainsi une exposition. Le fait d’avoir fait appel à ces étudiants a permis de s’ouvrir sur ce que l’on ne voit pas quand on est dans le milieu. En effet, la sensibilité qu’a cette génération sur les questions environnementales sous toutes ses formes est essentielle pour un renouveau de la culture. De plus, la question sociale se pose aussi.

L’Abbaye de Vaucelles (Abbaye du XIIe siècle) est un exemple intéressant. Situé en territoire rural (à 12 km de Cambrai) et avec une gestion juridique particulière, elle a subi un éloignement prononcé. En 2019, la gestion administrative « classique » est reprise par le département. Cette abbaye a connu moult destructions, avec les guerres médiévales, la Révolution française et les guerres mondiales. Dans les années 1970, cette abbaye est sauvée par des particuliers qui la rachète. Grâce à la préemption, le département a pu reprendre le bâtiment qui n’est malheureusement pas desservie par les transports en commun. Toutefois, de nombreuses programmations ont été proposée comme des concerts de musiques anciennes mais ces derniers ne touchaient qu’un public de niche. La volonté du département de travailler avec le Conservatoire de Cambrai dans le but de présenter des visites théâtralisées fut repoussée en raison des restrictions sanitaires du COVID-19. Le but est également de faire de ce lieu patrimonial un centre de rencontre. Actuellement, l’abbaye possède une maison construite par les anciens propriétaires. Cette maison pourrait permettre un espace de création puisqu’elle hébergerait les artistes, les musiciens, … Toutefois, les contraintes géographiques par rapport aux transports en commun et aux autres sites culturels est un réel problème. Le projet est de créer un projet viable pour 2022 – 2023. Bien que cette abbaye possède un large panel d’équipement culturel, cela n’est pas encore abouti.

Ainsi, la culture est une compétence qui n’est pas obligatoire pour les départements mais celui du Nord en a fait un thème central de sa politique culturelle et sociale. La richesse du paysage culturelle nordiste permet cet intérêt important. Le département travaille principalement autour de la recherche des moyens de transports et de l’égalité entre milieux défavorisés et milieux favorisés. La prochaine étape serait d’étudier une politique culturelle en lien avec les humanités numériques.

Célestin Toumit, 3 septembre 2021

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